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L’inspiration de la nature


    La nature est la plus importante source d’inspiration de l’Art nouveau.

    Plus qu’aucun autre élément de ce style, la nature représentait la modernité. En effet, au cours du XIXe siècle, la nature est de plus en plus perçue comme science. Les créateurs dépassent le naturalisme traditionnel en utilisant des formes dérivées de plantes exotiques, de la vie sous-marine et de la microscopie. Ils les trouvent dans de nombreux ouvrages botaniques et biologiques abondamment illustrés et publiés dans le monde entier.

    La manière d’approcher la nature prend de multiples formes dans l’Art nouveau, elle peut se traduire par la représentation de paysages, d’animaux ou de végétaux, de manière plus ou moins réaliste, dans leur cadre naturel ou pas, par exemple, sur le sgraffite de la façade de l’Hôtel Ciamberlani, construit par Paul Hankar en 1897 à Bruxelles, deux paons son représentés de façon assez réaliste, posés sur les branches d’un arbre donc dans leur élément naturel. La nature peut aussi servir de base aux modèles, en l’adaptant ou en la stylisant, par des lignes fluides et élégantes, en coup de fouet, des formes voluptueuses, des ondulations, des volutes, des torsions, des entrelacs, des spirales, des arabesques et des surfaces incisées, gonflées, amincies et des couleurs irisées, et des tons pastel…etc. C’est le cas de ces ferronneries de l’Hôtel Hannon construit par Jules Brunfaut en 1902 à Bruxelles dont les lignes végétales stylisées fluides et élégantes se confondent avec las branches de l’arbre. Ces formes végétales ou animales peuvent aussi être associées à des formes géométriques. De plus, étudier la plante signifie aussi comprendre un système constructif. Une approche beaucoup plus sculpturale se développe donc également, elle consiste à transformer de simples objets du quotidien en des formes organiques pures et abstraites, c’est le cas du vase coloquinte des frères Daum de 1910 qui comme son nom l’indique reprend la forme d’une coloquinte. Mais aussi architecturale en donnant aux bâtiments l’impression d’organismes végétaux aux formes ondulantes. D’autre part, nombre d’artistes utilisent les métamorphoses qui leur permettent de fusionner les formes animales, végétales et humaines.

    La nature sera utilisée par tous les artistes Art nouveau à de rares exceptions comme Van De Velde qui prône un ornement rationnel ou Mackintosh qui privilégie les lignes droites et les angles.

La verrerie Art nouveau sera introduite par la redécouverte de deux techniques: les émaux sur verre et la pâte de verre. La verrerie va se développer dans deux grands centres: Paris et l’Ecole de Nancy fondée par Emile Gallé mais aussi par les frères Daum, Louis Majorelle et Eugène Vallin.

rères Daum (Auguste et Antonin) - Vase Chrysanthème Victor Lemoine - 1897,

L’idéal de nature transparaît en tout cas chez tout les artistes européens. Cette idée n’est certes pas nouvelle. La nature idéalisée, théorisée dés l’époque classique notamment par Vitruve, a été reprise dés le XIVe siècle par les artistes italiens de la Renaissance. Le peintre et théoricien Giorgio Vasari en fait lui-même l’éloge dans Les Vies des peintres, publié en 1550 et 1568. A cette époque en Europe, la nature idéalisée était un concept extrêmement populaire, une véritable ligne de conduite des artistes. Le principe de l’uomo universale, homme universel capable d’étendre ses compétences intellectuelles dans tout les domaines d’application, ne permettait pas de prôner un domaine plus qu’un autre, ni d’opposer un domaine à un autre. Cela n’avait pas lieu d’être.

Henri Bergé, vitrail de la Femme au chat noir (Nancy), v. 1900

Pour quelles raisons l’Art nouveau sedéveloppe t-il surtout en milieu urbain ? C’est premièrement en ville que demeurent la classe bourgeoise émergente à qui reviennent les commandes d’oeuvres architecturales et autres. Paris est le noyau séculaire de la création artistique moderne. Il est donc normal qu’un Guimard ou qu’un Lavirotte profitent de l’héritage culturel qu’ils avaient à porter d’yeux.

Mais ce n’est pas seulement pour cela. Dans la même veine que Haussmann, les artistes Art nouveau ayant travaillé à Paris voulaient renouveler ce paysage urbain, en y incorporant des éléments végétaux, des courbes de lianes et de ronces, une floraison là où le consensus de l’industrialisation avait pris le pas sur toutes les façades.

Street view du 22 rue Trousseau, Paris 11e

Bijoux et objets : le Règne animal

La joaillerie Art nouveau constitue un réservoir fascinant de ce que le style peut contenir d’organique. Un bestiaire très riche apparaît dans les bracelets, colliers, peignes, broches et épingles du début des années 1900. C’est un véritable règne animal.

Les insectes sont particulièrement prisés. Leurs petites tailles et leurs formes très diverses permettent d’innover sans cesse dans la joaillerie. Le paon, le serpent et l’araignée sont également des animaux très répandus.

René Lalique, épingle à chapeau, v. 1900

George Fouquet, bracelet, v. 1900

L’inspiration de la nature humaine

    La femme est souvent représentée dans l’Art nouveau et ce de différentes manières.

    L’art nouveau n’utilise pas un type féminin précis mais c’est bien souvent une femme moderne, jeune, séduisante, à la beauté idéalisée, laissant apparaître certaines parties de son corps sous de grandes draperies, aux formes fines et arrondies rappelant celles de la nature, aux postures avantageuses et sensuelles et aux coiffures s’inspirant de la nature.

    De plus, tous ses attributs rappellent la nature, que se soient ses bijoux représentant des animaux ou des formes végétales réalistes ou stylisées, sa coiffure composée, d’arabesques, d’ondulations, de spirales…etc. reprenant des formes végétales stylisées, ou encore des éléments naturels comme des vagues, ses robes de par leur forme ou les motifs naturels qui les agrémentent, les végétaux qui ornent ses cheveux, ou ceux qu’elle tient dans les mains…etc.

    De plus, elle est souvent représentée entourée d’animaux ou de végétaux et les formes de son corps répondent aux formes végétales, par exemple, ses longs cheveux se déployant en volutes suivant le mouvement des vagues qui l’entourent. L’exemple de l’affiche de Mucha pour le Champagne Moët et Chandon, datant de 1889, illustre bien ces différentes idées. En effet, la femme représentée est jeune, séduisante, mince, ses grandes draperies laissent apparaître certaines parties de son corps, sa beauté est idéalisée, sa posture est sensuelle et sa coiffure se compose de lignes courbes et d’arabesques, faisant penser à des vagues et reprenant les éléments végétaux qui l’entourent. Ses draperies composées d’épaisses volutes ainsi que le ruban attaché sous sa poitrine répondent la encore aux éléments végétaux qui l’entourent.  De plus ses cheveux sont ornés de feuilles de vignes, elle tient un plateau contenant des grappes de raisins à la main et elle est entourée de vigne et de roses.

    Cette osmose avec la nature peut aller jusqu’à la métamorphose de la femme avec des animaux ou des végétaux. En effet, elle peut avoir un corps mi-humain mi-animal ou elle peut se confondre avec des éléments végétaux, son corps naissant par exemple d’un élément végétal, ou ses cheveux se transformant en véritables plantes et non plus s’inspirant seulement de leurs formes. On peut citer l’exemple de le « Femme libellule », broche de corsage de Renée Lalique datant de 1897, qui comme son nom l’indique métamorphose une femme en libellule. En effet, tout le bas de son corps est remplacé par un abdomen articulé de libellule, ses bras sont remplacés par des ailes elles aussi articulées, sa tête est surplombée par deux yeux et ce qui lui reste d’humain est de couleur verte. Les ailes pliantes en cinq parties ainsi que l’abdomen articulé donnent une véritable impression de vie, de liberté de voler.

   Le type féminin des artistes Art nouveau

Les artistes Art nouveau affectionnent les jeunes femmes modernes et séduisantes, à la beauté idéalisée et aux courbes parfaites, souvent dénudées. Leurs habits en drapés, rappellent l’Antiquité, mais les femmes portent tout aussi bien des tenues en accord avec leur époque. Leur pose sont langoureuses, pleines d’assurance.

Henri Bergé, vitrail de la Femme au chat noir

Les femmes-hybrides : domination et séduction

L’Art nouveau donne souvent lieu à d’étranges hybridations féminines. N’en témoigne René Lalique qui n’a cessé de conjuguer le corps féminin et le corps animal. La créature féminine, objet de désir, domine l’oeuvre. Elle est parfois dotée d’un aspect menaçant. La Femme-libellule, ce monstre merveilleux, s’impose fièrement et séduit à la fois.

René lalique, flacon

Allégories de la nature

Ces jeunes femmes sont bien sûr associées à la flore en plus de la faune. Les artisans doivent faire preuve d’une incroyable minutie pour valoriser les deux éléments. On retrouve chez Lalique la même symétrie dans chacun des objets à son nom: femme et nature doivent constituer une harmonie idéale.

Les sinuosité du corps féminin inspirent autant dans la confection de meubles. On privilégie des formes courbes, irrégulières et grâcieuses à la rudesse de la conception géométrique. La forme féminine est ainsi instrumentalisée à des fins esthétiques comme utilitaires. Le mobilier Art nouveau la met également en valeur. Bien sûr la thématique féminine n’a jamais été autant exploitée dans ce sens que dans les affiches.

Friedrich Goldsheider, miroir avec support en terre cuite, v. 1890

Les sources (Orient, extrême Orient, XVIIIème siècle, histoire locale,…)


Les influences de l’Art nouveau proviennent entre autres, d’Angleterre avec les travaux de John Ruskin qui s’intéressa à l’art gothique dont les principales caractéristiques sont la luminosité qui joue un rôle essentiel au sein de l’édifice (vitraux), la hauteur et la gestion de la poussée.

De plus, parmi les influences historiques les plus marquantes figurent différentes formes de classicisme, les styles baroques et rococo, mais aussi les Préraphaélites. Au-dela de l’Europe, les arts japonais et islamiques sont des sources importantes, suivi par les arts chinois. Certains pays puisent également dans les cultures des pays qu’ils ont colonisés.

Le milieu du XIXème siècle est alors marqué par l’ouverture de l’Orient et sa grande influence.

Les créateurs de verrerie de l’Art nouveau vont travailler de nouvelles techniques ayant pour inspirations esthétiques le japonisme. En effet, le Japon a une influence considérable sur l’Art nouveau qui présente dans ses oeuvres de nombreuses ornementations ainsi que différents motifs, tels que les motifs floraux, l’image de la femme ou encore la beauté de la ligne.

Katsushika Hokusaï, "Grande vague de Kanagawa", 1831

Comme on l’a vu précédemment, l’Art nouveau repose également sur une composition asymétrique et sur la volonté de représenter la nature.

Philippe-Wolfer, Libelle (pendentif libellule) 1902

Dans la mesure ou l’Art nouveau se développe dans l’idée d’une opposition plus ou moins ferme à l’essor industriel, on peut aussi interpréter le style comme une lutte entre l’organique contre la machine.